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Nous voici de retour pour faire le tour des années 30. Saviez-vous que la pédale Charleston à l'origine, ressemblait à une raquette de neige avec deux petites cymbales accrochées au pied ?

Dans les années 30, dans de nombreux états, il était illégal que des musiciens noirs et blancs jouent dans le même orchestre.

Nous verrons que pour cette raison, beaucoup de femmes ont fini en prison juste pour avoir voulu défier ces lois.

Mon nom est Vicky O’Neon, batteuse et prof de batterie. Nous allons voir tout ça en détail, et découvrir bien d'autres choses qui caractérisent ces années 30.

Générique

Épisode 4 : 1930-1940

  1.  Le swing et les « Big Band »

Le crack boursier de 1929 mit fin brutalement aux Années Folles. Une foule de gens se retrouvaient au chômage dans une période de crise très dure pour beaucoup de gens.

Pendant cette grande dépression, un grand nombre d’américains voulaient oublier toute cette misère et l’un des éléments qui les aida à supporter les difficultés fut bien sûr la musique.

Les gens dépensaient le peu d'argent qu'ils avaient pour se payer du bon temps. Malgré une période qui était morose, la musique des années 30 ne l'était certainement pas.

Le Swing, connu également sous les termes « jump or Jive » (sauter ou danser le Jive), désignait la nouvelle musique de jazz.

Les années 30 devinrent la décennie du swing et des Big-Band.

Le jazz évolua de pratiques très « underground » (clandestines), à une musique extrêmement populaire.

Disons que c'était la pop-musique du moment ; les Big Band étant les véhicules naturels du swing et du jazz.

À cette époque les orchestres ne disposaient toujours pas d'amplification. C’est le nombre de musiciens qui amenait la puissance sonore.

Les Big-Band pouvaient compter jusqu'à 20 instrumentistes. Ce mur de son était très puissant et amenait le public à danser.

Le style Swing amena naturellement à des styles de danse comme le « Jitter-bug » (Insecte agité en Français) le « Lindy Hop » (Adèle sautillante) et le « Shag » (Partie de jambes en l'air).

Les musiciens qui jouaient le Swing étaient appelés « les chats » et le terme décoller signifiait « prendre un solo » ou « improviser ».

Est-ce qu’il se trouve parmi vous quelques chats Jazzeux ?  

Vos commentaires sont à poster ci-dessous.

La sensation de « Swing » vient techniquement du fait de marquer ce qu'on appelle le off-beat ou contretemps en Français. (Démonstration à la voix 1 et 2 et 3 et 4.

Les orchestres de Swing étaient souvent des Big-Band qui mettaient en avant des soloïstes improvisant sur la mélodie, par-dessus les arrangements.

La radio, également présente maintenant dans la plupart des foyers, rend la musique bien plus accessible surtout si vous ne viviez pas dans une grande ville.

  1.  L'évolution de la pédale Charleston (Hi-Hat)

En même temps que le Jazz déferlait sur l’Amérique, la batterie connaissait également un succès retentissant.

On disposait maintenant du drum kit, cet ensemble de batterie qui avait atteint la même forme que celle à laquelle nous sommes habitués aujourd'hui. Caisse claire, grosse caisse, toms et cymbales et tous les pieds pour installer tout ça.

C'est également dans cette période que la Charleston fit sa première apparition, devenant tout de suite l'instrument majeur pour tenir le temps et accompagner cette grande époque des Big-Band.

Avant cette découverte, les batteurs étouffaient le son d’une cymbale pour marquer le temps mais vous aviez besoin de vos deux mains pour utiliser cette technique.

On cherchait un moyen d'utiliser son pied gauche pour compléter la pratique de l’instrument. Ce fut la raison de l’invention de la « cymbale raquette » ressemblant à une chaussure de neige. Elle était faite de deux petites cymbales attachées à deux planches superposées, reliées par une mâchoire de métal.

On enfilait la planche du dessus à son pied grâce à une lanière qui faisait ressembler le dispositif à une « raquette de neige » d'où son nom. (« Snowshoe »)

Cette première version de la pédale Charleston évolua vers ce qu'on appelait le « low boy » (gnome ou nabot) qui ressemblait déjà à la pédale actuelle, mais au ras du sol.

En fin de compte on parviendra à créer la vraie Charleston d'aujourd'hui qui rajoutait la possibilité de jouer avec des baguettes en même temps qu’avec le pied. Super !

Faisons un p’tit tour au studio pour vous montrer tout ça !

  1.  les « remplissages » dans les Big-Bands

Dans un premier temps je voudrais vous parler des remplissages parce qu’ils étaient assez différents de ce que nous sommes habitués à pratiquer aujourd'hui. Le « Fill » (remplissage) de nos jours, ressemble à ça. (Démonstration à la voix - sons de Tom avec une fin explosive sur la cymbale crash, jouée sur le premier temps).

Cette manière de finir sur le 1er temps n'existe pas avant les années 50. Avant cela tous les remplissages se terminaient sur le 4e temps. Quelque chose comme ça ; (Démonstration sur la batterie).

Une des raisons de ce jeu, réside dans la puissance sonore de la batterie (en sachant que les batteries de l’époque étaient encore plus grosses qu'aujourd'hui). Tous les autres instruments étant acoustiques, leur niveau de son était beaucoup plus faible. Terminer un remplissage sur le premier temps était quelque sorte impoli compte-tenu des différences de volume.

Un peu comme si les batteurs eussent marché sur les pieds des autres musiciens, empiété sur le temps réservé aux autres.

Une autre raison de ce marquage du 4e temps vient des rythmes syncopés de la Nouvelle-Orléans dans lesquels, on marque naturellement le 4e temps. (Démonstration à la voix).

Les batteurs commencent également à modifier cette manière de jouer des fanfares. Ils remplacent le « 2-feel » (succession grosse caisse, caisse claire ou

Charleston) pour passer au marquage de chaque temps à la grosse caisse (1-2-3-4) la technique utilisée étant le « feathering » (toucher de plume) où la grosse caisse est caressée très légèrement.

En accord avec le « feathering », on entend la « walking bass » du jeu du bassiste. (1-2-3-4 / 1-2-3-4)

Dans cette nouvelle évolution, c'est la grosse caisse qui devient la principale gardienne du temps, pendant que la Charleston devenue courante dans les drums kits vient tenir un rôle majeur, celui par exemple de marquer les 2ème et 4ème temps au pied. (Démonstration 1-2-3-4 / 1-2-3-4)

Simultanément vous pouvez également décliner quelques rythmes intéressants avec les baguettes, sur cette charleston. (Démonstration)  

La caisse claire quant à elle, vient maintenant ponctuer tous les accents de la musique.  

Voici donc ce à quoi la batterie en Big-Band ressemblait : (Démonstration- Sur le morceau « Elle devient folle à cause de la chaleur » The International sweetheart of rythm.

  1.  Gene Krupa

Gene Krupa est considéré comme le « père » créateur de la batterie moderne. A la tête de sa compagnie de fabrication de batteries « Slingerland ». Il a également accompagné le développement des Toms basses avec des systèmes d'accordage et des peaux de résonance.

Affiche Slingerland - Tom accordable – Revêtement de luxe.

Ces Toms-toms devinrent immédiatement indispensables aux ensembles de batterie et le sont toujours aujourd'hui.

Gene Krupa a également inventé et popularisé un grand nombre des techniques de cymbales d’aujourd'hui. Il a en outre collaboré avec le fabricant de cymbales Zyldjian pour améliorer la Charleston moderne.

  1.  Les femmes à la baguette

Mais attention, les années 30 en batterie, n’appartenaient pas qu’à Gene Krupa et une bande de mecs !

Beaucoup de femmes lançaient leur propre Swing Band comme « Inna Ray and her melodears » qui ont tourné dans tout le pays et enregistré pendant 5 ans ; elles apparaissent également dans de nombreux courts métrages de la Paramount.

Dolly Adams la jeune batteuse et multi-instrumentiste à succès, joua un rôle important sur la scène de La Nouvelle-Orléans.

À 16 ans elle forma et dirigea son propre groupe mais abandonna sa vie de musicienne quelques années plus tard après s'être marié.

Son mari la voulait à la maison pour élever leurs sept enfants.

Grâce à ses talents elle apprit à tous ses enfants à jouer de plusieurs instruments mais ce destin qui vous clouait à la maison après le mariage, était commun à de nombreuses musiciennes.

  1.  Viola Smith la batteuse la plus rapide d'Amérique

La femme qui eut la plus grande réussite à cette époque était Viola Smith ; on l’avait surnommée la batteuse la plus rapide d'Amérique.

Film d’époque : « Je voudrais vous présenter notre charmante petite batteuse Viola Smith. »

Elle était connue comme la version féminine de Gene Krupa. Elle avait commencé à jouer alors qu’elle n’était encore qu’une enfant avec ses 6 sœurs plus âgées. Les spectacles et les tournées avaient commencé pour elle au début des années 20 ; elle n’avait que 10 ans.

Elle eut une incroyable carrière couvrant six décennies en jouant dans des orchestres comme « les coquettes », « l'orchestre de femmes de Phil Spitalny ». On se rappelle ses nombreuses apparitions dans le fameux show de Ed Sullivan et bien d’autres choses encore.

Elle reçut également une bourse d'étude de la « Juilliard » (grande école de musique New Yorkaise) et apparut dans de nombreux films. Elle fit même la couverture du « Billboard Magazine » en 1940.

Viola attirait de nombreuses stars et révèle dans un article qu’elle n'avait eu aucun regret d'avoir rejeté les avances de Frank Sinatra, pas une seule fois mais deux, pendant sa carrière de batteuse.

Sa réputation de pionnière parmi les batteuses était incontestable et elle est aujourd'hui reconnue par le « Who’s who international de la musique ».

Elle nous a malheureusement quittée en 2020 à l'âge impressionnant de 107 ans.

Merci Viola pour toute votre œuvre. Partagez, vous-aussi, votre reconnaissance pour elle dans les commentaires ci-dessous.

  1.  Le Grand Mix

Les musiciennes de 1930 ont également joué un rôle déterminant dans les politiques raciales. Leur rôle a été reconnu comme fondamental pour l'abandon de la ségrégation.

A l’époque, mixer les races était toujours illégal dans nombre de situations quotidiennes, dans le sud des États-Unis.

 Parce que beaucoup de femmes blanches préféraient la sonorité des orchestres de jazz des femmes noires, en se rendant compte de leur incroyable talent, elles n’hésitaient pas (et ce n’était pas rare) à se grimer en noir pour rejoindre ces orchestres. Ce qui conduisit nombre d'entre elles directement en prison.

Les musiciennes blanches et noires de ces orchestres dénonçaient l'absurdité qui voulait que certaines doivent se peinturlurer de maquillages sombres et boucler leurs coiffures alors que les autres se lissaient les cheveux et chercher à se blanchir la peau.

  1.  Les Big-Band de femmes

Parmi les nombreux girls-band afro-américains qui ont connu un succès dans les années 30, le plus talentueux étaient le « Harlem play girls » fondé par le batteur et chef d'orchestre Sylvester rice.

La formation a tourné très activement dans le T.O.B.A circuit, association de propriétaires de salle du Tennessee, qui programmait les spectacles de variétés (Vaudeville Shows) joué par des Afro-Américains dans des cinémas, des clubs de jazz, des salles de danse et des théâtres de variétés.

Beaucoup de Ses membres poursuivirent leur carrière dans un groupe mixte : « Prairie View Coeds » (« Prairie View » est une localité de l’Illinois à une heure de route de Chicago-Coeds veut dire mixte).

D’autres membres rejoignirent cet autre groupe « The International Sweethearts of rhytm ». Ce groupe devint d'ailleurs un des plus gros Swing-Band des États-Unis des années 30.

La batteuse Pauline Brady était une des membres originelles de l'orchestre qui donna des spectacles incroyables dont la spécificité était de mettre en scène beaucoup d’instruments différents. Un des préférés de Brady était bien sûr le solo de batterie qu’elle jouait sur un morceau intitulé « Une batterie de rêve ». Elle commente ainsi cette performance : « Je mettais mes gants blancs ; mes baguettes, mes Toms-toms, mes cymbales étaient peintes de matières fluorescentes. Lorsqu’ils allumaient la lumière noire ; alors tout le public était en transe. » Pauline Brady.

 Je me reconnais tout à fait dans cette approche et pour cause. (image projetée)

« The International Sweethearts of rhytm » a aussi traversé l'Atlantique et inspiré les batteurs d'Europe.

Pendant ce voyage, des batteuses du groupe ont préféré rejoindre un autre orchestre, le « Ivy Benson all female swing band » qui était basé en Grande-Bretagne.

Ce groupe a été fondé en 1939 et ils ont continué à jouer jusqu'en 1983. Il tenait l’affiche principale de lieux prestigieux comme le Palladium de Londres et L’Ivy Benson Band est devenu l'orchestre résident de la BBC.

Les batteuses du groupe ont été Marie Clive, Bettie Thomas, Jean prine, Paula Pike et Crissy Lee.  Je vous recommande un livre remarquable écrit sur cette saga par Angela Smith. Son titre : « Les femmes batteuses » Vous y enrichirez vos connaissances sur toutes ces incroyables femmes qui se sont battus pour être batteuse !

 C'est incontestable que les femmes ont joué un très grand rôle dans l'évolution de la batterie et de la musique, mais nombre d'entre elles ont été oubliées.

Il faut bien constater que l'histoire de la musique a été établie comme une

His-toire. (racontée comme une histoire masculine.)

Jeu de mot en Anglais (History/His story) sur l’adjectif possessif His (masculin) qui donne Her(au féminin).

A une époque où les opportunités étaient loin d'être égales entre les genres. il était très difficile de donner une perspective sur la Her-story, son histoire à elle, leurs histoires au féminin.

J'espère que cette série peut aider à comprendre HER story.

 Ok ! C'est fini pour aujourd'hui. J'espère que vous avez Apprécié ce voyage dans les années 30. J'aimerais beaucoup avoir vos avis et commentaires ci-dessous. Abonnez-vous et regardez les épisodes précédents si vous ne l'avez pas déjà fait.

Générique   -    Épisode 4 : 1940-1950

La prochaine fois, nous verrons une nouvelle fois l'impact énorme de la musique afro-américaine sur le développement musical.

Nous rencontrerons également cette femme qui enregistra ce morceau célèbre « Hound dog » bien des années avant qu'Elvis ne s'en empare ! Et beaucoup d'autres choses encore.

A bientôt.

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